Beauty Party

Bonjour les beautés,

Voici le récapitulatif des produits utilisés lors de l’atelier et le déroulé:

1- TEINT
Comme je vous le disais c’est le plus important:

On cherche le fond de teint adapté à sa carnation en faisant des tests sur le visage. Si vous souhaitez un FDT couvrant préféré les Sticks ou FDT compact. Pour un teint léger, utiliser un fluide.

Nous avons utiliser un FDT d’Avon sur Karine, le compact (ivory) et le YSM 50 de chez Inglot sur Anna et moi même!

On poudre ensuite: pour fixer la poudre pressée Inglot le 15!

La poudre banane 501 Inglot pour illuminer le regard et atténuer les cernes! Le MUST have!

Le Blush ou poudre soleil Avon!

2- LES YEUX

Comme la plupart d’entre nous sommes pressées, j’ai opté pour la technique du crayon marron, rapide au ras des cils et en haut pour intensifier le regard: AVON Colour Trend dark brown

3- LÈVRES

J’ai opté pour un Rouge de chez Avon le ICE coffee qui passe avec toutes vos tenues!

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6 étapes pour un super TEINT

Bonjour les beautés,

Voici un récapitulatif les étapes pour LE TEINT

1- hydrater et/ou base (primer)
2- illuminer et anti-cernes (concealer)
3- fond de teint
4- poudrer
5- bronz-touring (countouring)
6- fard à joues (Blush)

N’oubliez pas que c’est le plus important avant d’attaquer le maquillage des yeux.

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Pour celles qui sont intéressées par ce que je porte en make up et vêtements, j’ai acheté:

– HAUT MANGO à 15€ (Saint-Pierre, ville)

– Boucles d’oreilles  Réserve Naturelle à 4,95€

Maquillage à petits prix:

– Rouge à Lèvres NYX n° 729 Chestnut (commandé sur Internet sur ce site http://www.nyxcosmetics.fr/) et il livre dans les DOM/TOM

– Mascara Gemey Maybelline

– Crayon brun des yeux Miss Den (acheté à Leclerc)

Bonne journée à vous.

Plein de bisous

Marie.G

Bonjour les amis,

Exceptionnellement ce matin il n’y aura pas de chapitres publiés. Je suis grippée et je me suis forcée à dormir pendant que mes filles étaient chez leur mamie. Désolée mais je n’ai pas pu faire les modifications sur les chapitres.
Des que possible je les fais et je les publie.
Merci de votre compréhension et à bientôt!!!!

Chapitre 11: Heures de colle

Vivre Son Rêve

11. Heures de colle

Dernier week-end des vacances

— Allez, viens! Ne sois pas stupide, tu ne vas quand même pas rester chez toi à te morfondre! Tout est arrangé! Ophélie est entre de bonnes mains et ton père a dit qu’il sortait.

— Ouais, mais imagine qu’il rentre entre temps et qu’il ne me trouve pas… j’suis morte de trouille!

— J’sais, mais faut prendre des risques dans la vie, m’a convaincue Julie.

Postée devant chez moi, elle attendait que je sorte. J’ai enfilé ma veste en jean et mes ballerines puis nous sommes allées manger des pizzas chez Rémi. Christophe et Alice nous ont rejoints, pour ma plus grande déception. Agacée par leur présence, je n’arrêtais pas de me mordiller les lèvres. Une fois les boissons avalées et les pizzas dégustées, les esprits se sont échauffés. Alice a proposé un jeu : Audace ou Vérité. Elle a sorti…

Voir l’article original 2 178 mots de plus

Chapitres 6 et 7

6. Alcool

« Plus d’hommes se sont noyés dans l’alcool que dans la mer. » W.C. Fields

Mi octobre 2008

Papa n’est pas rentré! Voilà deux jours maintenant qu’il a quitté la maison. Je ne sais pas où il est, je ne sais pas ce qu’il fait. J’ai peur. Que se passe-t-il?

La nuit dernière, je n’ai pas vraiment dormi. Ophélie et moi sommes en vacances, je l’ai laissé dormir jusqu’à ce 8h30. Nous avons traîné dans l’appart’ en pyjama toute la journée, errant comme des ombres, cherchant quelque chose à faire. Lasses, nous nous sommes installées devant la télévision, histoire de chasser les idées noires qui émergeaient en nous. Le cuir du canapé était glacé malgré la chaleur de la pièce. Dehors la pluie tombait de plus belle, vive La Réunion!

A la télé, les spots publicitaires affichaient leurs plus belles promotions pour les fêtes à venir. Je me suis laissée emporter par le flot de mes pensées…
Acheter des belles fringues et m’imaginer être quelqu’un d’autre, prétendre avoir une belle vie et une famille unie, une maison où règne la paix. Me voiler pour résister. Me cacher pour exister. Me sentir aimée pour ne pas me sentir partir. Pleurer pour me vider. Rigoler pour oublier toutes les peines endurées. Un jour, épouser quelqu’un de bien, ni trop riche ni pauvre, juste un homme qui saurait prendre soin de moi et panser mes plaies. Cet homme, pouvait-il bien exister?

— Tu crois que papa va revenir? Camille, tu m’écoutes? a répété ma petite sœur en me touchant le bras.
— Oui, pardon. Euh… Je ne sais pas, ai-je répondu pour être honnête avec elle.
— Tu sais, papa a fait des bêtises, mais je l’aime quand même.
— Oui, moi aussi, lui ai-je confié.

Des bêtises! Notre père avait plutôt commis des erreurs irréversibles! Il avait laissé des marques sur mon corps, mais surtout des traces sur mon coeur qui ne partiront probablement jamais. Comme un trou dans un mur ou comme une fissure quelque part, cela pourra être gommé mais ne pourra jamais être réparé.

Mon coeur à terre
Il gît et saigne.
Sa vie, sa haine
Il nous les laisse
Et se déchaîne
Sur nos misères.

Malgré l’absence de notre mère, Ophélie avait gardé l’appétit. Ce soir, elle a littéralement englouti le plat de pâtes au jambon. Quant à moi, le chagrin, les mauvais traitements de papa et le stress m’ont non seulement fait perdre du poids mais aussi des cheveux. Prenant ma douche maintenant, j’ai examiné mon corps: mon visage était creux, mes yeux cernés de fatigue; mon cou était marqué, mes poignets aussi. J’avais un hématome sur la cuisse, un autre sur l’avant-bras.
Je ne me suis jamais trouvée canon mais au moins avant, je pouvais dire que j’étais mignonne. Au collège, j’avais eu un petit copain, rien de sérieux, on ne s’était même pas embrassé. Un jour, j’ai appris qu’il fréquentait en même temps une autre fille et je l’ai quitté. Maman m’a rassurée en disant de ne pas être pressée, que je finirai bien par trouver chaussure à mon pied. À 14 ans, je m’en fichais un peu, je ne cherchais pas vraiment et puis l’idée de faire comme tout le monde me déplaisait.

Aujourd’hui, maman n’était plus là et je ne savais plus ce que je désirais vraiment. Avoir un petit ami me semblait impossible, alors que le désir d’être aimée et enlacée était tentant. Grandissait en moi l’envie de goûter à l’amour comme dans les films, de me laisser aller dans les bras d’un beau garçon pour oublier. «Mais de toute évidence, me suis-je dit, personne ne s’intéresse à moi.»
À cet instant, face au miroir qui me renvoyait ma laideur en pleine face, je me suis sentie si moche et si seule que j’aurais voulu mettre fin à mes jours.

Me sentir aimée pour ne pas me sentir partir…

Cette nuit, pendant que ma petite sœur dormait, j’ai cherché comme mon père un moyen d’enfouir mes soucis. J’avais jeté tout l’alcool, je ne possédais aucune drogue, que pouvais-je donc bien faire? Fumer un pétard? Je ne savais même pas fumer tout court, comment aurais-je pu m’en trouver un de suite. Me taillader les veines et me vider de mon sang? Tentant mais qui s’occuperait de ma sœur? Tout balancer et fracasser les affaires de papa me feraient le plus grand bien pour me défouler, mais je prenais le risque qu’il me le fasse payer après.

Une idée m’est soudain venue à l’esprit… Rien de dangereux. J’ai pris l’annuaire téléphonique et en cherchant un peu, j’ai trouvé le numéro de Mussard Christian, mon grand-père.
Il y a si longtemps de cela, papa s’était marié avec maman et n’avait pas suivi les traces de son père dans l’entreprise familiale. Ce dernier ne l’avait pas accepté et avait renié son fils en coupant les ponts avec lui. Voilà pourquoi je ne les avais jamais rencontrés sa femme et lui. La seule chose que je connaissais d’eux grâce à maman était que mon grand-père était créole et ma grand-mère venait de Bretagne. Papa n’en parlait jamais, au fond je pense qu’il en souffrait beaucoup.

De mes doigts tremblants, j’ai composé le numéro avant de vite raccrocher.
Bip bip bip…

J’ai recommencé et recommencé et recommencé une dizaine de fois. J’avais besoin de retrouver un semblant de famille, que nous soyons de nouveau unis, que mon père retrouve l’espoir qu’il avait perdu. Il fallait que j’essaye de renouer les liens et de réparer les dégâts du passé, je devais à tout prix trouver le moyen d’y parvenir. C’était capital, une question de vie ou de mort. Je ne pouvais pas rester là à ne nous regarder nous désintégrer et ne rien faire. Chaque jour, je voyais fondre telle la cire d’une bougie, le peu de lien qui nous unissait encore. Alors je devais essayer…
Biiiiiiiiiiiiiiiip biiiiiiiiiiiiiiiiip biiiiiiiiiiiiiiiip…
— Allô? a répondu une voix douce de femme
— Allô, ai-je dit timidement. C’est Mme Mussard?
— Oui, fit-elle, qui est à l’appareil?
Mais j’ai raccroché.

Papa est rentré. Il était ivre, sale mais silencieux pour une fois. Titubant dans le couloir, il a poussé un rire guttural, pour ne pas dire démoniaque. Ses yeux se sont animés d’un poison et ont craché leur venin sur mon âme apeurée. Ses mains autrefois taillées pour l’amour, m’ont poussé vers un abîme plus profond dans lequel je tombe, tombe, tombe.
Je ne sais pas où il était, je ne sais pas ce qu’il a fait. Lui seul en porte le secret.

7. Jour de pluie

Novembre

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La pluie était mon lot quotidien ces dernières semaines. Il tombait des cordes depuis une bonne heure déjà, aussi ne me suis-je pas pressée d’aller en cours.
En sortant de chez moi, comme à mon habitude, j’ai mis les écouteurs dans mes oreilles pour écouter John Meyer. Je me suis laissée aller à fredonner, étant la seule sur le chemin.
Mes problèmes s’évaporaient peu à peu, je devenais quelqu’un d’autre avec une vie différente. La mélodie m’inspirait, les notes de guitare acoustique m’emportaient encore plus loin dans ma rêverie, j’en oubliais même que j’étais trempée. Mais la réalité a vite fait de me rattraper; où que j’allais, mon présent me torturait. Arrivée au lycée, le rêve s’est estompé, je suis redevenue cette fille banale.

«Oh, génial! Mes chaussures ont pris l’eau, il ne manquait plus que ça! J’y crois pas.»

Dans la classe, quelle ne fut pas ma surprise de voir que mes classeurs aussi avaient pris la flotte. Je commençais même à avoir froid, mais j’ai fait la fière pour ne pas qu’on me plaigne. Mme Thibault n’a pas été contente de voir l’état de mes affaires, elle m’en a fait la remarque devant tout le monde! C’était plutôt embarrassant, surtout qu’Alice s’est réjouie de mon malheur. «Celle-là, je lui casserais bien la figure!»

Heureusement que l’anglais était l’une de mes matières préférées. J’ai réussi malgré tout à participer mieux que les autres, je n’avais pas de difficulté à ce niveau là, j’avais même une certaine assurance. C’était d’ailleurs la seule matière où je prenais la parole sans que l’on m’y force, ce qui n’était pas le cas pour les autres cours.

Pendant la récré, je suis allée directement dans la classe du cours suivant, préférant me terrer dans mon coin et noter sur une feuille de papier les paroles d’une chanson que j’avais en tête. Ces temps-ci, il me prenait l’envie de composer…

Une vie meilleure je connaîtrai
Un jour peut-être ou même demain
Sans regret je vivrai.
Never go back home again [Ne plus jamais rentrer à la maison]
M’agripper à quelque chose
Pour rester alive [Pour rester vivante]
Et même si je dérive,
I’ve got the right [J’ai le droit]
to be happy once again. [D’être heureuse une fois encore.]
— Mlle Mussard, vous ne voulez pas aller en pause ? a demandé monsieur Duchemann.
— Non, je suis bien ici.
— Vous en êtes sûre? a-t-il insisté en se plantant devant moi.

Pourquoi voulait-il absolument que j’aille me mêler à la foule? Je me sentais très bien dans ma solitude. Je ne désirais pas la compagnie de personnes qui ne me comprendraient pas.

— Mais vous êtes trempée? a-t-il continué en m’étudiant de la tête aux pieds.
— Oh ce n’est rien, par contre mes classeurs ont pris l’eau, je suis désolée.
— Vous n’avez pas de parapluie?
— C’est que… il pleuvait tellement fort avant que je n’arrive au lycée.
— Vous êtes venue à pieds?
— Oui, j’ai l’habitude de marcher.
— J’espère que vous n’allez pas attraper froid.
— Non, non. Ça va aller.

Mr Duchemann s’inquiétait à mon sujet, c’en était presque touchant! Il paraissait vraiment contrarié pour moi et me regardait discrètement, comme si quelque chose de grave m’était arrivée. Il a mis la main sur son front et a soupiré profondément. Enfin, la cloche a sonné, le cours a commencé, il portait sur la dissertation. Cette fois encore, je n’étais pas emballée par le sujet.

Mr Duchemann nous a ensuite ordonné d’ouvrir notre livre à la page 45. Je n’avais pas fini d’écrire mes paroles, il me fallait terminer avant d’oublier. Feignant d’écouter la lecture, j’ai donc continué à composer faisant une pause parfois pour ne pas me faire prendre, les mots me venaient :

There is deep inside of me [Il y a tout au fond de moi]
This sweet little melody [Cette douce et petite mélodie]
Which yesterday came into my heart. [Qui hier est entrée dans mon coeur]
Ce soir, pendant que je m’endors
Je ne l’entends plus pourtant,
Elle a quitté mes pensées.
This sweet l
ittle melody [Cette douce et petite mélodie]
Which used to sooth m
y pain [Qui apaisait ma peine]
I want to hear it again. [Je veux l’entendre encore]
Oui, je veux l’entendre encore.

— Miss Mussard? Vous n’avez pas l’air de m’écouter. Pourriez-vous répéter ce que je viens de dire, mademoiselle Dubard?
— Je ne sais pas, a répondu ma copine de classe.
— Mussard, emmenez-moi ce que vous êtes en train d’écrire, s’il vous plaît.
— Je prenais des notes, ai-je menti.
— Bien, emmenez-les, je vous prie, a-t-il ordonné sans me lâcher des yeux.
— Tenez, ai-je fait en lui lançant pratiquement la feuille.
— Attention à votre attitude, m’a-t-il réprimandée. Il y a un temps pour toute chose, et ce n’est certainement pas le moment pour composer, mais pour écouter.

Il va sûrement me commander de le lire à haute voix, pour me faire honte devant tout le monde.

— Retournez vous asseoir. Je ne vais pas vous demander de le lire, je ne veux pas vous humilier, je veux juste vous enseigner. Cela étant dit, c’est un très beau texte que vous avez là.
— Merci.
A-t-il lu dans mes pensées?
— Miss Dubard, prenez la suite de la lecture, s’il vous plaît. Après, ce sera à vous Miss Mussard.

Dubard Julie était jolie et assez extravertie. Elle se faisait souvent prendre en train de parler ou écrire des mots aux autres.
Elle m’a fait un petit sourire d’exaspération, accompagné d’un hochement de tête. Derrière moi, j’ai entendu Alice nous traiter d’idiotes! Je l’ai foudroyée du regard, jusqu’à ce qu’elle baisse les yeux. Je ne pouvais pas supporter les filles de son genre: grande, mince, intelligente et riche, elle croyait tout connaître et mettait les garçons à ses pieds. Quand est venu mon tour de faire la lecture, je l’ai entendue qui murmurait je ne sais quoi à sa voisine, heureusement Mr Duchemann l’a interrompue.

— Au fait, avant que vous ne partiez, vous devez choisir une option entre théâtre, musique et danse. Je vous fais circuler une fiche pour vous inscrire à l’atelier de votre choix. Chaque groupe fera un spectacle en juin.
— On est tous obligés d’y participer, a demandé Julie.
— Oui, tous, sans exception.
— Pour moi ce sera théâtre alors, a lancé Julie.
Une fois la feuille devant mes yeux, j’ai voulu cocher musique mais j’ai senti que c’était trop tôt. Après tout, j’avais mis de côté le piano depuis le décès de maman. De plus, j’étais nulle en danse. J’ai donc choisi théâtre.
— Bien, c’est Madame Thibault qui s’occupe de la danse, Mr Richard de la musique et moi du théâtre.
— Quand est-ce que les cours commencent, ai-je demandé timidement.
— A la rentrée de janvier normalement. Le spectacle regroupera les trois ateliers, il débutera par les danses et la musique. Je vous en dirais plus la semaine prochaine. Mademoiselle Mussard,
attendez un instant, j’ai à vous parler.

Pourvu qu’il ne me pose pas question sur ma vie personnelle. Pitié!

Les autres élèves étant sortis, j’étais livrée entre les mains de mon bourreau de professeur, bel homme qui plus est.

— Oui, ai-je dit craintive.
— Je voulais juste vous remettre ce parapluie. Je pense qu’il est assez grand pour vous couvrir et protéger votre sac.
— Oh, merci.

Comme une idiote, j’ai pleuré sans pouvoir m’arrêter, personne ne m’avait prêtée une si gentille attention depuis longtemps.

— Merci.
— Allez, ne pleurez pas. Tout va s’arranger, a-t-il murmuré en mettant la main sur mon épaule.

Son contact était si doux et agréable. J’ai contemplé ses doigts posés sur moi. Ça faisait si longtemps que quelqu’un ne m’avait pas touchée avec autant de délicatesse. «C’est idiot! Mais, je délire complètement, là!» À trop vouloir être aimée, j’ai attaché trop d’importance à des petits gestes qui ne valaient rien.

Mr Duchemann m’a tendu un mouchoir en papier et chose étrange, mes forces m’ont lâchée, comme si un poids énorme venait s’écraser sur moi. Je me suis assise sans voix.

— Je dois y aller maintenant, Mlle Mussard.
— Bien sûr. A demain, Mr Duchemann.
— A demain.

Je tenais le parapluie tel un immense trésor. Je n’en revenais pas qu’un professeur pût se soucier de moi, surtout après que j’ai manqué d’attention à son cours. Je ne méritais pas ce cadeau.
Je me suis hâtée de rentrer à la maison pour tout raconter à Ophélie. Ce fut l’une des plus belles journées de ce mois, si ce n’est la seule.

Les chapitres 3,4,5…

Bonjour les amis,

Comme promis, voici les 3 chapitres suivants… N’hésitez pas à partager et surtout à me faire part de vos commentaires pour que je puisse m’améliorer.

                                                                  3. What a day! [Quelle journée!]

03 octobre 2008

A terrible day ! [Une horrible journée!]
Je descendais la rue Pierre Cadet à grands pas, afin de ne pas être une fois de plus en retard au lycée. La lumière était douce, les rayons du soleil caressaient mon visage, mais encore une fois, j’ai été perturbée par l’attitude de certains hommes dans leur voiture qui n’avaient aucun scrupule à détaillerles passantes sur le trottoir, quand ils ne sifflaient pas ou ne klaxonnaient pas. Aussi, ai-je tenté de dissimuler mon visage derrière mes cheveux, pour ne pas avoir à croiser leur regard.

Quand je suis arrivée, des lycéens s’agglutinaient déjà devant le portillon du haut. Ils fumaient des cigarettes, l’un d’eux grattait une guitare. Je ne pouvais m’habituer à voir les filles venir au bahut en short ou en mini-jupe, révélant ainsi leur peau bronzée et leurs jambes musclées, et ce, quelle que soit la saison. C’était inimaginable là d’où je venais!

J’ai rapidement longé la cour en direction du bâtiment A où j’ai retrouvé ma classe. J’étais à bout de souffle d’avoir grimpé les escaliers quatre à quatre.
— Bonjour ! Le cours d’aujourd’hui sera différent, a dit Mr Duchemann. Nous accueillons ce matin, Mlle Hoarau qui va aborder avec nous un sujet qui, je suis sûr, saura capter toute votre attention.
— Bonjour ! Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis l’infirmière de votre établissement et je suis venue vous parler clairement et sans détour de quelque chose qui concerne la plupart d’entre vous: la sexualité. Je vous préviens, je ne serai pas la seule à prendre la parole. J’attends que vous participiez au débat, en toute franchise, sans honte ni vulgarité. N’hésitez pas à poser des questions ou à partager votre expérience.

Derrière moi, j’ai pu entendre les mecs faire des commentaires déplacés sur l’infirmière.
— Hé, a chuchoté Christophe, mais c’est qu’elle est hot notre infirmière! Je sens que je vais être souvent malade pendant les cours, cette année. J’te parie que 5 secondes seule avec moi, elle tient pas et me saute dessus!
— Gros mytho, va! Comment tu te la joues? Mais, fais gaffe, y a de la concurrence! Regarde le prof comment il bave sur elle! T’as aucune chance, mec!
— Chut ! ai-je sifflé pour les faire taire. Leur manque de respect vis-à-vis de cette femme m’horripilait.

Puis Mlle Hoarau a engagé la conversation avec des statistiques qui m’ont fait froid dans le dos:


— Ces dernières années, le nombre de jeunes ayant des relations sexuelles avant leur majorité a quadruplé. Ce ne serait pas tant un problème si les grossesses non désirées et les maladies sexuellement transmissibles ne s’étaient pas aussi multipliées. Mon but ici est de vous sensibiliser à cela et de vous inciter à vous protéger, car sachez-le: pour 20 minutes de plaisir non protégé que vous pourriez avoir, c’est toute votre vie qui peut basculer. Voyez vous-mêmes si ça vaut vraiment le coup!
— 20 minutes, Mademoiselle? C’est que vous ne m’avez pas encore connu! a lancé l’autre prétentieux dont la remarque a fait rire tout le monde, même moi.
— Très drôle Mr Dijoux, mais entre nous, cela m’étonnerait que Mlle Hoarau choisissent ses amants au berceau, l’a corrigé notre professeur principal avec humour.


Cassé!


— Allons, un peu de sérieux! Revenons au sujet, s’il vous plaît, a enchaîné l’infirmière, avec d’autres chiffres alarmants: 74% de jeunes interrogés pour une étude en 2007 ont avoué avoir déjà consulté des sites pornographiques hard. Les études menées à La Réunion montre que la majorité des hommes auraient leur premier rapport vers 17 ans contre 18 ans chez les femmes. En général, les hommes déclarent avoir une moyenne de 13 partenaires sexuelles contre 3 pour les femmes. Selon une autre étude menée auprès de 145 jeunes filles, La Réunion est le 2ème département pour les grossesses précoces et le troisième en termes d’IVG chez les moins de 18 ans. Encore une fois, ce ne sont que des chiffres, mais la réalité est souvent bien pire. 2,7 millions de personnes ont été infectées par le VIH dans le monde entier. Savez- vous que peu de jeunes utilisent un moyen de contraception, alors qu’il en existe plusieurs à leur disposition? Pourquoi à votre avis? J’ai vu des jeunes filles venir me consulter pour des prétendus maux de ventre et m’avouer par la suite, qu’elles étaient très inquiètes parce qu’elles avaient eu des rapports non protégés… On va passer à la pratique maintenant, vous allez me montrer si vous savez utiliser un préservatif.
— Bien sûr, mademoiselle! J’suis un pro, j’en enfile tous les jours des capotes et même, plusieurs fois par jour, s’est encore vanté Christophe.
— Ouah, l’autre! Ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il le fait tout seul! s’est moqué Stéphane, un de ses meilleurs potes.
— Et toi, jusqu’à aujourd’hui tu croyais que c’était juste des bombes à eau!! a répliqué Christophe visiblement vexé. Mais vous devriez le montrer à Mussard, mademoiselle; elle en aura besoin bientôt, à moins qu’elle préfère un cours particulier, je peux lui en donner, moi, quand elle veut…


A ce moment-là, j’ai essayé de me convaincre que l’ignorance était le plus grand des mépris et j’ai feint l’indifférence, mais au fond de moi, je bouillais. Après seulement un mois et demi passé dans ce lycée, on m’avait déjà cataloguée comme la fille coincée, toujours vierge à 17 ans.
Qu’en savent-ils, d’abord, que je suis encore vierge? C’est quand même pas écrit sur mon front! Ça ne regarde que moi, c’est mon intimité. Et puis, en quoi est-ce une tare? Pourquoi devrais-je déjà avoir des relations sexuelles? Pour faire comme tout le monde? Et après, qu’est-ce que ça m’apporterait de plus? Les autres m’accepteraient, parce que je couche? Alors là, non merci! Qu’ils se la gardent, leur acceptation. Je préfère encore rester seule et être moi-même, quitte à passer pour une ringarde marginale, plutôt que d’intégrer la clique en faisant ce qu’ils attendent de moi sans me préoccuper de savoir si je suis prête ou pas. Je veux pouvoir choisir quand et surtout qui.


— Justement, Mr Dijoux! Puisque vous êtes un si grand expert, faites-nous profiter de votre expérience, a déclaré Mr Duchemman en lui remettant le préservatif emballé et le double décimètre sur lequel on devait le dérouler.
— Bien fait ! s’est exclamée Julie.
Mr Duchemman m’a fait un clin d’oeil compatissant, j’étais toute rouge. Cet idiot de Christophe m’avait affichée devant toute la classe. Mlle Hoarau a ensuite demandé à notre professeur de distribuer deux préservatifs à chacun de nous. Embarrassée, j’ai promptement rangé les miens dans ma trousse sans réfléchir.
— Certains jeunes, a repris l’infirmière, ont confié avoir eu des rapports sexuels sous la pression des autres : ami(e)s, petit(e) ami(e)…
— Sachez, l’a interrompue Mr Duchemman, que personne n’a le droit de faire pression sur votre vie sexuelle. C’est VOTRE choix. Qui d’autre que vous, peut savoir si vous êtes prêt ou prête à avoir un rapport?
J’ai été soulagée d’entendre qu’au moins quelqu’un d’autre pensait comme moi. Je me suis, d’un coup, sentie moins seule.
— Vous pouvez aussi demander conseil à votre médecin traitant ou aux sages-femmes du planning familial, ils sont tenus au secret professionnel et vont répondre à vos questions sans vous juger. Beaucoup de jeunes de votre âge font les malins, mais en réalité, ils sont ignorants des pratiques sexuelles et ça crée des catastrophes. Si je vous dis: «fellation», «sodomie», «levrette», ça vous évoque quoi? Combien de filles ont pleuré dans mon cabinet à cause de positions que leur copain avait vu dans on ne sait quel film ou livre et leur avaient demandées de reproduire, alors qu’elles n’en avaient ni la connaissance ni l’envie. Elles ont été brisées et traumatisées par ces rapports. Que dire encore de ces jeunes filles qui se prostituent au collège? Vous avez bien entendu, accepter de faire une fellation dans les toilettes pour de l’argent ou un téléphone portable, c’est de la prostitution et mon rôle est de vous informer, afin de vous protéger. Après, c’est votre corps et je ne peux pas vous interdire d’en disposer selon vos désirs, mais soyez-en certains: chaque décision entraîne des conséquences et l’on ne ressort pas indemne de ces comportements à risques.
Après quelques minutes de silence, comme personne n’osait prendre la parole, l’infirmière nous a proposé d’écrire nos questions sur un morceau de papier anonyme et de les glisser dans une boîte. C’est Mr Duchemman qui a été chargé de tirer les questions au sort.

Question n°1: «Que pensez-vous de la pornographie?» Quelqu’un veut répondre?
A nouveau, le silence total.
— Personne?! Bien, je vais répondre, a déclaré notre professeur. Je pense que la pornographie déforme la réalité et que ceux qui les regardent se privent d’avoir des relations sexuelles riches. Les jeunes s’imaginent que la sexualité est telle qu’on la voit dans ces vidéos, ils font leur propre mise en scène et filment avec leur téléphone portable. Mais la sexualité pornographique est violente et animale, elle n’a rien avoir avec l’amour que sont censées faire les 2 personnes. Et quand, dans la vraie vie, vous n’arrivez pas à être aussi performant que tel ou tel acteur ou actrice, qui je vous rappelle, joue un rôle, vous complexez et la frustration engendrée peut parfois entraîner des déviances, a conclu Mr Duchemman.
— Vous parlez pour vous, là monsieur?
— Je parle pour qui se reconnaîtra dans mes propos.
— Moi, j’trouve ça dégradant, ai-je osé m’exprimer.
— Qu’est-ce que t’y connais? a sifflé Alice, sans me laisser une chance de lui répondre. Son opinion sur moi était déjà toute faite, à quoi bon essayer de lui démontrer qu’elle avait tort.
Question n°2 : est-ce que les MST ou IST sont transmissibles par le sexe oral?
— Oui, dans certaines conditions et selon les microbes, la syphilis par exemple peut se transmettre de cette façon, le virus de l’herpès aussi.
Question n°3 : est-ce ringard d’attendre le mariage à notre époque?
— Carrément, a répliqué Christophe.
— Moi, j’trouve ça romantique!
— Tu n’es même plus vierge, Julie! Tu peux oublier, l’a malmenée Alice.
— Je vous rappelle que nous ne sommes pas là pour nous lancer des méchancetés, a rétorqué notre professeur. Je vous demande de respecter l’opinion des autres. Pour ma part, attendre le mariage, si les deux personnes sont d’accord, je trouve que c’est respecter l’autre et se respecter soi-même.
Le débat a continué ainsi pendant le reste de la matinée. Ensuite, Mlle Hoarau nous a donné rendez-vous à l’infirmerie, chacun à notre tour, dans l’après-midi. Rendez-vous qui m’a paru interminable avec une série de questions sur mon poids, mes règles, mon activité sexuelle.
Comme si la journée n’avait pas été suffisamment chargée en émotions, mon père n’est pas venu me chercher et j’ai dû rentrer à pieds… What a day !!! Happily, it was over now. [Quelle journée!!! Heureusement qu’elle était maintenant terminée.]


04 octobre 2008

— Papa, faut aller faire les courses, y a plus rien à manger.
— Je te dépose, tu sais très bien que je déteste faire les courses.
— J’peux rester l’après-midi là-bas avec Ophélie?
— Oui, comme tu veux.
Ça arrangeait bien papa de me déléguer la «corvée» comme il disait, alors que faire les courses était une vraie partie de plaisir pour Ophélie et moi; cela nous permettait de sortir de nos quatre murs et de voir du monde ailleurs qu’à l’école.
C’était un de ces samedis où le centre commercial était bondé. Ma liste à la main et Ophélie qui marchait à ma droite, je me sentais libre comme une femme adulte faisant ses emplettes. La galerie n’était pas grande, mais elle offrait tout à portée de main : une parfumerie, une pharmacie, quelques boutiques de prêt-à-porter et de chaussures, un point chaud, un distributeur de billets et même un magasin de bricolage.

— Et si on allait boire quelque chose? ai-je proposé à ma sœur.
— Ouiii! Là-bas Camille, viens!
— C’est comme si on était grandes! Oh non, notre table est déjà prise!

Depuis que nous avons emménagé à La Réunion, j’ai essayé de nous créer de nouvelles habitudes: ainsi, un samedi sur deux, notre sortie au supermarché commençait par une pause chocolat chaud à la table du fond (pour ne pas changer). Ce jour-là, il a malheureusement fallu nous installer autre part et la table du milieu, celle où tout le monde pouvait nous voir, était la seule disponible. Je détestais ça.
Dans la vitre en face de moi, j’ai vu mon reflet: une jeune fille au regard triste, les cheveux détachés et un peu sauvages, des yeux marron-vert, des tâches de rousseur, un tee-shirt blanc basique et un jean délavé. «Rien d’extraordinaire», ai-je pensé. Maman, elle, savait mieux se mettre en valeur.

— Tu es belle, a marmonné Ophélie comme si elle avait lu dans mes pensées.
— Mouais ! lui ai-je répondu, peu convaincue.
— Tu es belle, je te dis! La plus belle des sœurs, a-t-elle ajouté dans un grand sourire.
Qu’aurais-je fait sans elle? Du haut de ses six ans, elle savait tant de fois mettre du baume sur mon coeur à travers ses paroles gentilles.
Après avoir commandé nos chocolats chauds et notre part de tarte à la banane, nous nous sommes amusées à observer les gens et à dire non seulement ce que nous aimions sur leur personne mais aussi ce que nous trouvions bizarre.
— Oh, regarde! Lui, il a une drôle de coiffure.
— C’est clair. Hé! tu vois la fille devant nous? Je kiffe trop ses savates! [savates=tongs]
— Camille, ce n’est pas ton prof là-bas?
— Non, pas lui!
— T’inquiète, il ne nous a pas vues. Panique pas.


Mr Duchemman était jeune -peut-être 28 ou 30 ans- blond aux yeux noisettes, avec une certaine classe, je devais l’admettre. Attablé un peu plus loin, il portait une chemise marron avec un jean et des chaussures noires. Il lisait un livre, une tasse de café à la main. Sans m’en rendre compte j’ai dû le regarder trop longtemps, car il a levé la tête et m’a saluée de la main. Je lui ai souri et j’ai rapidement détourné mes yeux de sa personne.


— Tu es toute rouge, a chuchoté Ophélie.
Notre boisson terminée, nous avons filé faire les courses. J’ai laissé Ophélie pousser le chariot qui était un peu haut pour elle, mais elle était tellement contente de faire comme les grands.
— Alors, nous avons besoin de lait, de chocolat en poudre, de beurre, de biscuits, d’oeufs, de parmesan, de Brie, de jus de fruits, de pâtes, de haricots verts, de thon en boîte…
— N’oublie pas les yaourts brassés et le café pour papa!
— T’as raison, Ophélie! Je ne les avais pas notés sur ma liste. Merci, lui ai-je dit en lui faisant un clin d’oeil. Elle s’est mise à glousser, fière qu’elle était d’avoir pu m’être utile.
— Je vais chercher le beurre et les yaourts, je te confie le caddy. Attends-moi là ou on va nous piquer la place.
— OK!
Je l’ai retrouvée à la caisse quelques minutes après.
— Tu as été sage?
— Comme une image! Camille, ce soir, on fait un pique-nique maison?
— Bonne idée! Macaroni cheese, ça te va?
— Ça me va. On se mettra du vernis sur les ongles aussi, et il nous faut un film. Camille, je crois que c’est ton prof’ derrière nous. Il m’a fait coucou.
— Ophélie arrête!
— Je n’ai rien fait, il m’a juste dit bonjour.


J’ai vite payé et remis les courses dans le chariot avant de me diriger vers la sortie. Cet après-midi au centre commercial était censé me détendre et me permettre de couper avec ma vie morose de lycéenne. Au lieu de cela, j’ai rencontré le prof qui était tout le temps sur mon dos et Alice qui passait son temps d’habitude à me charrier, n’a rien dit en me croisant dans les rayons mais son regard dédaigneux sur moi a suffit pour que je me sente minable. Un vrai désastre! Pour couronner le tout, papa ne répondait pas à son portable, il nous a sans doute oubliées et je n’avais pas assez d’argent pour prendre le bus ou le taxi avec Ophélie. J’ai commencé à angoisser et mes nerfs ont lâché. Debout devant le centre commercial, près des chariots, les sacs à terre, les bras ballants, j’ai craqué. Ophélie a enroulé ses petits bras autour de moi.


— Pleure-pas! On va attendre, il va arriver. Je t’aime, ma soeur chérie!
— Je t’aime aussi. Excuse-moi. Ça va aller, je suis juste fatiguée.
Que faire? Il était maintenant 19 heures et toujours pas de papa à l’horizon. Cela faisait bien une heure que nous l’attendions dehors avec Ophélie.
— Un souci, mademoiselle Mussard? a demandé Mr Duchemann en s’approchant.
— Oui, a répondu Ophélie avant que j’en ai eu le temps. Papa nous a oubliées, il ne répond pas au téléphone et on ne peut pas rentrer chez nous.
— Non, ai-je menti, je pense que papa a eu une urgence à l’hôpital et n’a pas pu venir nous chercher. Nous allons l’attendre.
— Ecoutez, il commence à se faire tard et vous ne savez pas à quelle heure votre père va arriver. Je vais vous ramener.
— C’est gentil, mais ne vous inquiétez pas. On va prendre le taxi, c’est mieux.
— Mais Camille, t’as dit qu’on n’avait pas assez d’argent! s’est interposée Ophélie.
— D’accord, voilà ce qu’on va faire: je vais vous payer le taxi, venez!
— Merci beaucoup, ai-je répondu, gênée mais le coeur rempli de gratitude.


Serviable et prévenant, Mr Duchemann a porté nos sacs jusqu’au taxi collectif, il s’est assuré que nous n’étions pas les seules filles à bord puis il s’est arrangé avec le chauffeur pour qu’il nous dépose les premières. Malgré moi, je me suis sentie humiliée. J’avais bien réussi à me débrouiller toute seule avant ce jour-là. Et maintenant, le prof allait-il changer d’attitude envers moi en cours? Allait-il me prendre en pitié ou chercher à en savoir plus sur ma vie? Je n’en avais pas envie. Cela me faisait même peur.
Quand j’ai poussé la porte de l’appartement, papa était là, couché dans le canapé, ivre-mort, la bouteille de vin encore à la main. Il n’y aurait pas de pique-nique maison pour nous ce soir…

                                                                                   4. Adaptations

plage
La Réunion était une réelle découverte pour nous. Quand nous étions en métropole, papa nous en avait très peu parlé, mais maman m’avait confié que c’était l’un de ses endroits préférés au monde. Forte de cette révélation, j’ai cherché à me rapprocher d’elle en apprenant à mieux connaître l’île.

Très tôt ce samedi matin, papa avait pris son poste au CHU de Saint-Pierre. Le service de chirurgie orthopédique était débordé, avait-il laissé entendre et il ne rentrerait pas avant 19h00. Avant de partir, il nous a laissé un peu d’argent de poche sur la table de la cuisine, au cas où nous voudrions sortir. Le ciel était bleu et sans nuage à l’horizon. Ophélie et moi avons alors enfilé nos maillots de bain, nos tenues de plage et nos savates. Ainsi vêtues et nos serviettes de plage dans notre sac à dos, nous avons pris la direction de la gare routière du Tampon.

Comme nous étions à pieds, nous avons pris le temps d’observer les alentours. En suivant la route nationale, nous sommes passées devant le bureau de tabac du 12ème KM, puis le marchand de légumes et le centre médical. Les cours étaient fleuries et bien entretenues. Ensuite, au rond-point, nous avons descendu la rue du lycée, qui m’a paru bien vide.

Il nous a fallu une bonne vingtaine de minutes pour arriver à la gare près du marché couvert. Nous avions déjà soif à cause de la chaleur. Notre car est enfin arrivé. Des jeunes se sont rués à l’intérieur, pour être sûrs d’avoir les places du fond. Ophélie et moi, nous nous sommes assises devant et c’est en silence que nous avons regardé les rues défiler devant nos yeux ébahis. Les paysages n’avaient rien à voir avec ce qu’on voyait en France, ils étaient beaucoup plus colorés et variés. Certaines maisons étaient typiquement créoles avec leur dentelle blanche ornant les toitures, d’autres affichaient une architecture plus européenne.

Le car jaune est passé de quartier en quartier, s’arrêtant à plusieurs reprises pour prendre davantage de passagers. Enfin, nous voilà sur la 4 voies! J’aimais cette portion de route bordée de flamboyants et de jacarandas au premier plan et de champs de canne à sucre à perte de vue à l’arrière-plan. Cette perspective de verdure qui s’étendait pour se perdre dans le bleu de la mer et du ciel, était à couper le souffle.

— Camille, je crois qu’on est arrivé, a chuchoté Ophélie, me tirant subitement de ma rêverie.
— Ah oui, merci. On descend. Plage de l’Etang-Salé, nous voici!

Marcher nous avait creusé l’estomac et l’heure du déjeuner étant proche, nous nous sommes d’abord arrêtées à un camion-bar pour nous acheter des sandwichs.

— Je ne sais pas quoi prendre, a murmuré Ophélie.
— Maman disait qu’elle adorait les bouchons au combava, je vais en prendre une barquette pour goûter et aussi le fameux sandwich avec les frites dedans.
— Super!!!

Le snack ambulant placé sous un arbre -un filao je crois- n’était pas très grand. Il y avait néanmoins quelques chaises et des tables pour manger tranquillement à l’ombre d’un store. Le cuistot a pris ma commande:

— Un américain, ai-je demandé mal assurée, craignant de me tromper et d’être ridiculisée.
— Bien, avec quelle sauce s’il vous plaît?
— Euh… sans sauce, c’est possible?
— Oui, c’est possible, mais ce sera un peu sec. Je vous conseille, si vous le permettez, de le tester avec du Ketchup. J’en mettrai un petit peu pour vous, a-t-il proposé gentiment.
— D’accord! Va pour du Ketchup! Pourrais-je aussi avoir des bouchons au Combava, 5, avec un peu de sauce soja et une grande bouteille d’eau minérale s’il vous plaît? Merci.
— Ça marche! Je vous appelle, quand c’est prêt.
— Merci.

Je lui ai tendu la monnaie et avec Ophélie, nous nous sommes installées à une table. L’air de rien, nous étions bien au soleil, à prendre du bon temps. La commande est arrivée. Le sandwich américain vanté par maman était succulent, bien que très calorique. Il me faudrait nager longtemps pour éliminer tout ça.
— Si on allait voir cette plage et nager un peu? ai-je proposé.
— Ben oui! On est là pour ça, non?
— Yes!
— Camille, tu as vu la couleur du sable? C’est cool!

En effet, le sable était étrangement noir, scintillant et surtout brûlant. Impossible d’y marcher pieds nus. Nous avons installé nos paréos et serviettes sur la bande de sable séparant un bassin où l’eau était calme et une zone où la mer était plus agitée. Pas très à l’aise de découvrir mon corps encore marqué par quelques bleus, j’ai décidé de garder mon tee-shirt et de n’enlever que mon short. J’ai étalé la crème solaire sur le visage, le dos et les bras d’Ophélie pour la protéger, elle a fait pareil pour moi, car à côté des autres personnes présentes sur cette plage, nous étions blanches comme neige.

— Tu ne veux pas venir avec moi, a supplié Ophélie.
— Non, pas pour l’instant. Vas-y, je te surveille. Mais pas loin, hein? Tu restes là où c’est calme, ok?
— Je sais nager de toute façon.
— C’est vrai, mais ce n’est pas une raison. Fais attention.
— Oui, maman!
— Comment tu m’as appelée?
— Pardon, s’est excusée ma petite sœur avant de courir dans la mer.

Je ne pouvais pas lui en vouloir, après tout, c’est moi qui m’occupais d’elle depuis que maman est morte.

Devant moi était allongé un trio de filles. J’ai reconnu l’une d’elles qui était aussi à Roland Garros, mais en BTS. Elle affichait fièrement ses seins nus. Nul besoin de préciser que le regard des garçons se posait souvent sur elle.
Quelques minutes plus tard, Ophélie est sortie de l’eau pour jouer dans le sable et s’amuser à construire un château de sable. Je me suis levée pour la rejoindre. Ça lui a fait tellement plaisir!
Malgré moi, j’ai pu entendre la discussion des filles.

— Tu as vu les mecs qui jouent au beach-volley là-bas? Ils ont l’air mignons.
— Miam-miam. Il faut tenter une approche. Si on allait marcher un peu de leur côté pour les voir de plus près?
— Let’s go!

Elles se sont arrangé les cheveux, se sont mis du gloss sur les lèvres et se sont levées en adoptant la démarche chaloupée qu’ont les femmes quand elles veulent séduire. Curieuse, je les ai regardé faire. J’ai scruté la réaction des hommes sur leur passage. Certains ont tourné la tête, d’autres les ont sifflées sans gêne. Telles des prédatrices chassant leur proie, elles sont arrivées au niveau des sportifs. A mon agréable surprise, les hommes n’ont pas semblé leur prêter la moindre attention, concentrés qu’ils étaient sur leur partie et c’est bredouilles qu’elles sont revenues à leurs serviettes.

— Camille, j’aimerais bien aller faire un tour.

L’heure avait filé. Ma petite sœur commençait à s’ennuyer. Je l’ai accompagnée, tandis qu’elle courait sur le sable. Tout avait l’air normal. Nous avions l’air normales, pourtant mon coeur saignait en pensant à notre mère. Avait-elle aimé cette plage ? Je me souviens qu’elle l’avait mentionnée. Ma réflexion s’est arrêtée à la vue de mon professeur de français. En short et torse nu, il n’avait pas l’air si sévère.

Embarrassée, j’ai baissé les yeux et passé mon chemin, mais un ballon a atterri à mes pieds.

— Mlle Mussard, pourriez-vous me rendre mon ballon, s’il vous plaît?

Comme pendant les cours, j’ai été tétanisée par le regard de ces gens sur moi et j’ai gardé l’objet dans les mains. Mr Duchemann a dû me le reprendre lui-même.

— Camille, c’est ça?
— Oui.
— C’est votre petite sœur, n’est-ce pas?
— Oui, elle s’appelle Ophélie.
— Bonjour, a lancé celle-ci joyeusement.
— Elle est mignonne, vous vous ressemblez beaucoup.
— Merci. On doit filer, ai-je dit pour couper court.
— Bon week-end, les filles!
— Merci, a répondu Ophélie en le saluant de la main et le gratifiant de son beau sourire.

Je n’étais plus du tout d’humeur à traîner dans les parages et surtout, à 16h00, il était temps pour nous de prendre le car et de retourner au Tampon. Nous étions rouges comme des écrevisses et la peau nous brûlait. J’avais oublié de renouveler l’application de la crème solaire. Maman ne l’aurait pas oublié, elle. Pourvu que papa ne s’en rende pas compte!

                                                                                 5. Cours de soutien

La journée s’annonçait mal. Il pleuvait énormément dehors. Dans ma chambre, je pouvais entendre les plocs de la pluie sur le toit de l’immeuble. Collant mon nez à la baie vitrée, j’admirais le ciel sombre qui déversait son torrent de larmes sur la chaussée abîmée. La météo était en parfait accord avec mon humeur du jour: maussade.

J’ai chaussé des bottes en velours sombre et choisi une robe fluide beige pour son côté décalé et sa longueur suffisante qui couvrait les bleus que j’avais sur les cuisses. En me regardant dans le miroir, j’ai trouvé beaux mes cheveux ce matin: ils étaient lisses, longs et d’une couleur aussi dorée que les rayons du soleil quand celui-ci voulait bien se montrer.

Papa nous emmenait à l’école aujourd’hui, une première depuis notre arrivée! Il n’était pas encore prêt, nous l’attendions, affalées dans le canapé. J’ai balayé notre séjour du regard. Il était sobrement aménagé dans un style plutôt sympa, mais froid. Il donnait l’impression que personne n’y vivait vraiment. Les murs beiges accueillaient quelques tableaux, rien de très personnel cependant, juste des paysages. Aucune photo de famille. Des meubles teintés wengé, un canapé en cuir ivoire, une table à manger et une table de salon contemporaines, des chaises en microfibre taupe aspect daim, un tapis rouge. Je n’ai pas pu m’empêcher de laisser traîner mon écharpe sur le canapé. J’ai pris les coussins posés trop parfaitement sur le fauteuil et je les ai éparpillés ça et là, comme maman l’aurait fait si elle avait été encore là. Elle avait été l’âme de notre famille; son amour, chaque jour, avait illuminé nos vies. Depuis, tout était devenu fade et insipide; les choses avaient perdu de leur saveur.

— Il est l’heure d’y aller, a crié papa depuis l’entrée.

Nous avons couru jusqu’à la voiture pour éviter l’averse, comme si nous pouvions éviter d’être trempés. Papa a laissé échapper un juron et a claqué la portière. Le trajet a été bref, heureusement! En peu de temps, j’étais dans l’enceinte du lycée, me précipitant vers ma salle de cours.

— Désolée pour le retard, Mr Duchemman, ai-je prononcé, haletante et honteuse.

Le prof m’a jeté un de ces regards qui vous cloue sur place. C’était comme s’il lisait à l’intérieur de moi, fouillant les moindres recoins de ma pensée. En général, il n’avait pas besoin de hausser le ton pour se faire respecter, il nous regardait juste et son autorité s’installait.
C’était aujourd’hui qu’il devait nous rendre nos dissertations sur Pensées, je n’avais pas été emballée par le sujet.

— Mussard. Bon devoir mais hors sujet : 06/20, a-t-il dit en me tendant ma copie sans même me regarder.
— Quoi?
— Il faut peut-être étudier plus avant d’aller faire bronzette sur la plage.

Énervée, humiliée, dépitée, j’ai ravalé ma colère, j’ai baissé la tête et je me suis murée dans le silence. J’ai pianoté sur la table, tout en regardant mon devoir d’un mauvais œil. Si j’avais eu des super pouvoirs, je l’aurais brûlé rien qu’avec mes yeux! C’était la deuxième fois d’affilée que j’avais une note en dessous de la moyenne en français. Ce n’était jamais arrivé! J’ai de suite pensé à papa, car je connaissais trop bien sa réaction devant de mauvais résultats. Il détestait la médiocrité.


— Tous les élèves qui ont eu moins de 10 sont chaleureusement invités à assister au cours de rattrapage que j’ai mis en place entre midi et deux.
— Tu parles d’une invitation!
— Ces heures supplémentaires sont, bien entendu, données pour votre profit et ne sont en aucun cas obligatoires. Ce n’est pas non plus une punition. Cette année, vous passez votre bac et ce n’est pas à un mois des épreuves qu’il faudra rechercher mon aide. A vous de décider!

Nous étions cinq concernés : Julie, Christophe, moi-même et deux autres gars. Personne n’était vraiment enthousiaste, moi je n’avais pas le choix. C’était soit assister au soutien et améliorer mes notes, soit risquer une nouvelle rouste avec papa.

Après français, nous avions histoire-géo avec Mr Dufour. Ça m’a paru long et ennuyeux, le prof n’avait pas l’air passionné par son métier, quant à moi je n’y voyais aucun intérêt. Mes notes dans cette matière étaient par conséquent catastrophiques. Lorsque Mr Dufour s’est mis à dicter le cours, plutôt que d’écouter attentivement, Alice et Christophe ont commencé à flirter sans scrupule juste derrière moi.

— C’est écœurant! s’est exclamée Julie.
— Le prof ne voit rien. J’y crois pas!

Ce dernier a accéléré la cadence, personne ne pouvait plus le suivre. De toute façon, peu avaient réussi à le suivre jusqu’à là.

À midi, toujours le même rituel. Les mêmes élèves au réfectoire, toujours aussi affamés et bavards. La même table avec en prime le mec louche de la dernière fois. Je n’ai pas pu me retenir de l’envoyer balader, mais il s’est imposé en s’asseyant juste en face de moi.

— J’te dérange, a-t-il demandé.
— Oui, ai-je répondu en sortant de mon sac un livre que j’ai posé devant moi.
— T’es pas très sociable!
— Je ne t’ai pas demandé ton avis.

Concentre-toi sur ces lignes…

Les mots défilaient sous mes yeux : sujets, verbes, compléments… mais je ne comprenais rien de ce que je lisais, j’étais trop perturbée. L’envahisseur mastiquait tellement fort en me détaillant comme si j’étais un rat de laboratoire. Je me suis dépêchée de terminer mon plateau, sans prendre la peine d’apprécier les aliments. Une fois la dernière bouchée avalée, je me suis levée avec hâte pour fuir la présence de ce taré.

— J’te fais peur? a-t-il craché l’air satisfait.
— Pas du tout. J’ai fini de déjeuner, c’est tout, ai-je répondu en me levant prestement.
Non, mais pour qui se prenait-il?

J’ai grimpé les escaliers quatre à quatre pour ne pas être en retard et m’afficher une fois de plus. En entrant dans la salle de soutien, je n’y ai trouvé que Christophe. Alors, je me suis assise le plus loin possible du pseudo-obsédé.

— Camille! Viens-là ma belle, qu’on essaie de faire plus ample connaissance tous les deux. Tu sais, je crois que notre relation a commencé sur de mauvaises bases et qu’il faudrait y remédier. Tu m’as l’air de plus en plus intéressante, a-t-il déclaré en prenant ses affaires pour s’installer à côté de moi.
— C’est bien ce que je pensais: t’es complètement défoncé! T’as-vu tes yeux? Pourquoi t’es venu au juste? lui ai-je demandé, en tentant de détourner son attention de ma personne.
— Pour réviser, bien sûr. T’es venue pour autre chose, toi? Finalement, pour une métro, t’es plutôt mignonne! Mes parents sont de sortie ce soir, j’fais une teuf, tu devrais venir.
— Non merci.
— Tu peux même crécher si tu veux, a-t-il suggéré, en me caressant le bras, que j’ai retiré aussitôt.

Par chance, Mr Duchemman est arrivé. Enfin!

— Hé, bien! Il n’y a pas foule à ce que je vois. Prenez votre devoir. Mussard, comme je vous l’ai dit ce matin, vous avez fait une bonne dissertation qui, malheureusement, était hors sujet.
— Oui, je sais. C’que j’fais, n’est jamais assez bien! Je n’suis qu’une idiote de toute façon!
— Je n’ai jamais rien dit de tel. Mr Dijoux, lisez l’énoncé à haute voix s’il vous plaît et dîtes-moi ce que vous comprenez.
La langue pâteuse et lourde, Christophe a commencé à lire à la vitesse d’un escargot, tout en étant persuadé d’aller trop vite!
— Mr Dijoux, vous ne pensiez tout de même pas que je n’allais pas remarquer votre état de défonce?
— J’suis cassé, monsieur! C’est à cause du taf’ hier soir.
— Si j’vous revois encore dans MON cours, alors que vous avez consommé de la drogue, j’vous colle un rapport! Et vous pouvez remercier Mlle Mussard, car si je ne risquais pas de me retrouver seul avec elle dans cette salle, j’vous aurais viré de mon cours sur le champ. Est-ce bien compris?
— Oui, monsieur. Mais ça, c’est pas de la drogue, c’est un médicament naturel! Contre la migraine. J’en ai souvent, vous savez?
— Bien sûr! Tu crois apprendre à un vieux singe à faire la grimace? Je sais ce que c’est se défoncer. J’ai fumé le joint, moi aussi et pas qu’un peu. Crois-moi, à part oublier momentanément tes problèmes, ça ne t’apportera rien de bon, surtout pour ton cerveau et tes poumons.
— Monsieur, vous êtes dangereux!
— Si je me permets de te parler comme ça, Christophe, c’est parce que je sais que tu vaux mieux que ça! Tu as certainement un talent, un don dans un domaine, une passion pour quelque chose?
— Vous croyez ça, vous, Monsieur? J’sais pas, j’aime bien la musique, le graff aussi! Les gars aiment bien mes créations.
— Alors, pourquoi ne pas concentrer ton énergie là-dedans? J’te fais confiance?
— C’est bon, monsieur!
— Revenons à nos moutons. Mademoiselle Mussard, qu’est-ce que vous comprenez à l’intitulé du
sujet?
— Je ne sais pas, ai-je répondu timidement.
— Si vous voulez que je vous aide, il va falloir y mettre du vôtre, s’est agacé Mr Duchemann.

Panique à bord! Je sens que je vais faire naufrage.

J’ai senti dans ma gorge se former une boule qui grossissait, grossissait, grossissait, jusqu’à ce que je ne puisse plus la contenir. Je me suis mise à pleurer comme une madeleine, prise de panique et de honte aussi. Je ne supportais plus qu’on me crie dessus sans raison.

— Hé, qu’est-ce qui se passe? a-t-il demandé avec inquiétude en s’approchant de moi.
— C’est rien! ai-je bredouillé sur la défensive.
— Non, ce n’est pas rien, vous pleurez! Je n’ai rien dit de méchant. Allez, calmez-vous. Vous n’êtes pas nulle! Ce n’est qu’une mauvaise note, après tout. Ce n’est pas ça qui montre votre valeur. Regardez-moi Camille. VOUS êtes importante, sinon vous ne seriez pas sur terre. Ce n’est pas les notes qui font ce que vous êtes. J’vais vous aider à avoir votre bac, à faire de VOTRE mieux et c’est bien ça qui compte, que vous soyez allée au MAXIMUM de vos capacités, qui sont, j’en suis certain, bien au-delà de vos propres limites. Cela est valable pour vous aussi, Mr Dijoux. Reprenons maintenant.

Mr Duchemman s’est assis en face de nous, il nous a donné des explications claires et simples. Je n’en revenais pas, il était le seul prof que je connaissais qui, bien qu’il soit sévère, encourageait ses élèves. Il ne nous dénigrait pas comme certains de ces collègues. C’était quelqu’un de bien.

Eurêka! J’ai fini par comprendre ce qu’il attendait de nous.

— Ah, enfin un sourire! Vous voyez, ce n’était pas si difficile. Mr Dijoux, n’oubliez pas notre conversation. Je suis votre prof principal, mais j’ai été lycéen moi aussi. Si vous acceptez mon aide, je suis là.

Pour une fois, je n’étais pas pressée de quitter le cours. C’est en silence que j’ai ramassé mes affaires en emportant avec moi la gentillesse de mon professeur.

— Mademoiselle Mussard, vous avez de la valeur. Je le répéterai jusqu’à ce que vous y croyez.
— Merci. Bonne journée!

Quand je suis sortie de la salle, cette phrase de Saint-Exupéry m’est revenue à l’esprit: «On ne voit bien qu’avec le coeur, l’essentiel est invisible pour les yeux.» Mr Duchemman m’avait vue avec son coeur.

19H00

— Il n’y a plus rien à manger! Comment on va faire? Ophélie, je vais aller à pieds à la supérette du coin nous acheter quelque chose.
— Mais la nuit ne va pas tarder à tomber!
— Je ferai vite. Tu m’attends sagement à la maison, tu t’enfermes à clé et si papa revient, dis-lui que je suis allée faire des courses. C’est compris?
— Oui mais j’ai peur, a-t-elle pleurniché.
— Je vais faire vite, c’est promis.

Heureusement que le quartier est calme le soir. Je me suis dépêchée d’aller acheter du pain, du jambon, du fromage et des barres de céréales pour le petit déjeuner. Cela m’a tout de même pris quarante minutes pour faire l’aller-retour.

A la maison, j’ai préparé les sandwichs et nous avons mangé dans la précipitation avant que papa ne rentre. Comme chaque soir depuis trois mois maintenant, je me suis ensuite assurée que ma sœur dorme avant le retour de notre père. Je ne voulais pas qu’elle voit qu’il avait encore bu, beaucoup trop bu même, pour oublier et noyer son chagrin.

Le bruit de ses chaussures sur le parquet a résonné dans la pièce. Il a heurté l’enfilade dans le séjour et le vase qui était posé dessus, est tombé, se brisant en mille morceaux. Il a prononcé plusieurs jurons.

— Papa…

Ne voulant pas de mon aide, il m’a repoussée et je suis tombée au sol. J’ai commencé à nettoyer les éclats de verre, soucieuse du danger. La bouteille à la main, papa s’est allongé comme d’habitude sur le canapé. Il a porté le goulot à ses lèvres mais trop saoul, il a renversé de l’alcool sur lui-même. Énervé, il a failli glisser en se relevant. Je me suis proposée de l’aider, mais une nouvelle fois, il m’a poussée hors de son chemin.

— J’ai soif! Où est le rhum?
— J’ai tout jeté, ai-je dit fièrement.
— Quoi?

Il s’est rué sur la poubelle et a constaté les bouteilles vides ; il les as prises une à une et les as lancées vers moi.

— J’en ai besoin. Vas m’en acheter!
— Papa tout est fermé à cette heure-ci. Et puis, t’as déjà trop bu!

Trop hébété pour comprendre ce que je lui disais, il a crié de plus belle en s’avançant vers moi, l’air menaçant. Il a attrapé mon poignet et m’a tirée jusqu’à la cuisine.

— Tu vois toutes ces bouteilles? J’en avais besoin et toi, qu’est-ce que t’as fait? Tu n’es qu’une idiote !
— Ce n’est pas bon pour toi de boire autant, papa.
— Oui, je suis ton père et tu dois m’obéir. Enfant stupide, va!

Agacé, il m’a jetée contre l’évier, je me suis cognée la tête contre le meuble, puis par chance, il est retourné au salon, n’en pouvant plus de chercher de l’alcool.

Après une demi-heure d’angoisse, seule assise à même le sol de la cuisine, j’ai entendu ses ronflements. Soudain, j’ai commencé à avoir des sueurs froides, puis j’ai vomi le peu que j’avais pu manger. Machinalement, je me suis relevée et j’ai tout nettoyé, Ophélie ne devait rien savoir. C’est pour elle que je tenais! Tant de fois la drogue m’avait appelée, tant de fois la fugue m’avait invitée, tant de fois le suicide m’avait tentée. J’étais prise au piège dans la prison de ma vie. Ce soir, les morceaux de verre auraient pu faire l’affaire pour mettre fin à toute cette douleur qui me tourmentait, mais que deviendrait Ophélie? Je ne pouvais pas la laisser seule avec papa, elle subirait le même sort que moi. Je ne peux pas. Je n’ai pas le choix. Rester et résister.

Ressentant le besoin de noyer ma peine, non pas dans l’alcool mais sur le papier, j’ai griffonné mon journal. A mesure que j’écrivais, la douleur s’extirpait de mon âme, chaque mot libéré m’enivrait.

Je n’en peux plus, j’étouffe.
Ce gouffre qu’est ma vie
M’engloutit et je souffre.
La peur me brutalise
Les mots me martyrisent
Le silence me terrorise.
L’élixir dévore ses veines
Inhibe ses peines, excite sa haine.
Il l’entraîne plus loin et l’enchaîne.

JAMAIS TROP TARD… PROLOGUE, CHAPITRES 1 et 2

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Prologue

Mon existence : insignifiante ! Du moins, c’est ce que je croyais il y a quelque temps. Si j’avais pu revenir en arrière, j’aurais changé le cours des choses et ramené à la vie celle que je n’ai cessé d’aimer mais qui s’en est allée trop tôt. Malheureusement, ceci m’était impossible.

Un soir, tandis qu’il pleuvait, mes parents sont sortis. La chaussée était glissante, papa a perdu le contrôle de la voiture et maman a été tuée sur le coup! A cet instant, la vie de ma famille a basculé dans les ténèbres. Nous avons été propulsés dans cet autre univers sombre et violent qui n’aurait pas dû devenir le nôtre. Dès lors, aussi incroyable pour moi que cela puisse être, rien pour nous tous n’a plus jamais été comme avant.

Moi, Camille, je me souviens encore de cette soirée qui, au premier abord, était comme les autres. Les parents étaient partis depuis une heure déjà et Ophélie et moi en profitions pour nous mettre du vernis rose bonbon sur les ongles en regardant la télé en pyjamas, comme on aimait le faire quelquefois avec maman. Nous avons passé un agréable moment, puis ma petite sœur de cinq ans a fini par s’endormir sur le canapé devant une série qui me faisait tant rigoler. Dehors la pluie tombait fort. Je me suis emmitouflée dans une couverture, une tasse de lait chaud à la cannelle dans les mains.

A 23 heures, ne tenant plus éveillée devant la télé et bien que les parents ne fussent pas encore rentrés, j’ai couché Ophélie dans mon lit. Comme c’était les derniers jours de vacances, maman nous avait autorisées à dormir ensemble. Le lendemain matin, aux environs de 8h00, je préparais le petit déjeuner avec Ophélie en essayant de ne pas faire trop de bruit pour ne pas réveiller les parents, quand le téléphone a sonné. Ce simple coup de fil, j’aurais préféré ne pas le recevoir. Il a bouleversé nos vies à jamais. Et si je n’avais pas décroché?

Martine, une collègue de papa, est ensuite venue nous chercher ma sœur et moi pour nous amener à l’hôpital, auprès de nos parents. Un silence pesant régnait dans la voiture, je sentais chez cette dame que je n’avais rencontrée qu’une ou deux fois auparavant, comme une tristesse qu’elle tentait de dissimuler et qui faisait grandir en moi un mauvais pressentiment. Je n’osais pas lui poser de questions, ayant trop peur de la vérité. Tout ce que je savais était que mes parents avaient eu, la veille, un accident de voiture.

L’hôpital dans lequel travaillait mon père est soudain devenu lugubre à mes yeux, ses odeurs me retournaient l’estomac et ses murs blancs me renvoyaient une image de mort omniprésente. Nous avons pris l’ascenseur et avons retrouvé papa dans une salle de réveil. Il avait quelques bleus et des pansements. Aucune trace de maman. Martine a proposé d’emmener Ophélie à la cafétéria, je suis donc restée avec papa ne sachant quoi dire ni quoi faire. Je ne comprenais pas pourquoi maman n’était pas à ses côtés.

— Papa, tu vas bien ? Tu vas t’en sortir, pas vrai ?

— Oui ma chérie! Ne t’inquiète pas, je vais m’en sortir.

— Et maman, où est-ce qu’elle est? Je veux la voir.

— Ce n’est pas possible.

— Comment ça «ce n’est pas possible»?

— Elle est morte Camille. Nous ne la reverrons plus.

— NON!!!

— Elle est morte, tu m’entends?

— NON…

Sur son lit, j’ai fondu en larmes. Mes oreilles bourdonnaient, ma bouche était sèche et tout à coup, je me suis mise à hurler. J’ai tapé des poings avec violence contre le mur avant de m’écrouler sans force sur le sol. Je me rappelle qu’à cet instant précis, j’ai désiré mourir ou disparaître afin de ne plus ressentir cette douleur qui me déchirait le cœur. Je ne pouvais pas croire ce qui m’arrivait. Martine est revenue avec Ophélie et j’ai dû prendre sur moi et me calmer aussitôt pour ne pas effrayer ma sœur. De façon spontanée, je l’ai prise dans mes bras et l’ai tenue longtemps contr moi, de peur de la perdre elle aussi. De ses toutes petites mains, elle a caressé mes cheveux avec tendresse et m’a offert son plus beau sourire. Comment allais-je lui annoncer la terrible nouvelle?

Nous avons embrassé papa, puis nous sommes retournées à la maison avec Martine, qui comme moi, était soulagée qu’Ophélie se soit endormie. Une fois rentrée, j’ai couru dans la chambre de mes parents et je me suis jetée sur leur lit. Maman y avait laissé son pyjama qui portait encore l’odeur de son lait pour le corps, une odeur de vanille bien à elle que je chérissais comme un trésor. Je le serrais fort sur mon cœur tout en cherchant des yeux chaque détail qui me ramènerait un petit bout d’elle: ses pantoufles bleues déposées près de l’armoire, sa brosse à cheveux sur la table de nuit, le dernier livre qu’elle était en train de lire… Tout

avait désormais son importance. Dans la salle de bains, elle avait laissé son maquillage en vrac près du lavabo: son mascara noir, son fond de teint compact, son rouge à lèvres, son blush, elle n’avait pas eu le temps de les remettre dans sa trousse. Sûrement, elle s’était parfumée d’une touche de J’adore car le flacon signé Dior n’était pas refermé.

Lui avais-je dit au revoir avant qu’elle ne quitte la maison ? Savait-elle que je l’aimais ? Quelle était la dernière chose que l’on avait faite ensemble ? Je ne savais plus, je ne pouvais m’en rappeler parfaitement, pourtant il ne fallait pas que j’oublie. Tout est devenu flou ensuite. J’ai été réveillée dans le lit de mes parents par Martine. Elle ne savait plus comment faire avec Ophélie qui pleurait et réclamait maman. Papa est revenu en fin de journée. L’enterrement a eu lieu le lendemain et ma petite sœur n’a pas compris pourquoi on avait mis sa maman dans une boîte au fond de la terre. Je lui ai expliqué que si nous continuions de l’aimer et de la garder dans notre cœur, elle ne serait jamais loin de nous. Il semble que cette pensée l’ait apaisée, je m’y accrochais de toutes mes forces. Le plus dur restait encore à venir: le quotidien sans celle que tous, nous aimions.

La maison paraissait bien vide sans maman. Ophélie parlait tout le temps d’elle et me demandait ce qu’elle pouvait bien être en train de faire. Papa, lui, restait de longues heures au travail pour ne pas rentrer. Cette mort subite, il ne se le pardonnait pas. Ce n’était de la faute de personne, pourtant il ne cessait de répéter qu’il n’aurait pas dû insister pour l’amener à cette soirée alors qu’elle n’en avait pas envie, mais où ma petite sœur et moi l’avions convaincue d’aller pour se changer les idées. Quant à moi, je me suis retrouvée à 16 ans à devoir m’occuper d’une enfant et de la maison, sans oublier de faire mes devoirs car l’école avait repris.

Cette année scolaire 2007 se déroulait plutôt mal. Fatiguée, seule avec mon chagrin, j’avais du mal à me concentrer en cours, mais lorsque je ramenais de mauvaises notes à mon père, il ne cherchait pas à comprendre ni à m’aider, il s’énervait.

— Tu ne peux pas échouer Camille, ta mère et moi comptions sur toi.

— Mais papa, c’est si dur sans elle!

— Tu te laisses aller et ce n’est pas bien. J’exige que la prochaine fois, tu me ramènes de meilleurs résultats. C’est compris? — Oui, ai-je répondu exaspérée.

— Ne me parle pas sur ce ton, Camille! Si ta mère était là, tu n’aurais pas réagi de la sorte.

— Mais elle n’est plus là, et toi non plus d’ailleurs. Tu es tout le temps au travail, nous n’avons plus de papa.

— Ça suffit ! Monte dans ta chambre!

— Si maman était là, tu ne m’aurais pas traitée comme ça!

Pour toute réponse à ma réplique, j’ai reçu une gifle et j’ai couru m’enfermer dans mon lieu secret, là où j’avais conservé tous les trésors laissés par maman : son parfum, son maquillage, ses habits préférés.

Ophélie et moi avons continué de dormir ensemble. Comme elle faisait souvent des cauchemars, je lui ai donné le pull de maman pour qu’elle le mette chaque fois qu’elle avait peur. Elle en a fait son doudou.

Malheureusement, papa s’est mis à boire lorsqu’il ne travaillait pas. Il achetait une, puis deux voire plus de bouteilles d’alcool fort et s’enfermait dans la chambre pour les ingurgiter. Le gouffre entre nous se creusait de plus en plus, nous n’avions plus aucune relation, ni aucune conversation. Je ne pouvais comprendre son mutisme et son indifférence. Malgré tout, je l’aimais. Il était mon père, lui aussi souffrait et je ne pouvais qu’imaginer sa douleur.

Plusieurs mois se sont écoulés et un jour, papa a décidé qu’il fallait déménager. Confronté à mon refus, il s’est fâché et m’a rouée de coups pour la première fois. Il était soûl. Heureusement, ma petite sœur était chez une copine cet après-midi-là, je n’aurais pas voulu qu’elle voit ça. Il n’avait jamais manifesté une telle violence, il ne semblait plus se contrôler. C’est surtout l’expression de son visage qui m’effrayait, les coups je ne les sentais plus vraiment, j’encaissais. Une fois sa rage passée, il s’est assis sur le canapé et a pleuré. Il était désolé et m’a demandé pardon plus d’une fois ; mon cœur d’enfant l’a excusé. J’avais déjà perdu ma mère, je n’allais pas en plus perdre mon père ! Le lendemain et les jours suivants, comme je refusais de faire les cartons et de vendre les affaires de maman, j’ai à nouveau subi la colère de papa, encore et encore. Je lui criais que maman n’aurait pas aimé le voir dans cet état, mais cela ne faisait qu’augmenter son courroux. Il a fini par vendre le piano de maman, celui qu’elle aimait tant, et donner tout ce qu’il a trouvé lui appartenant dans la maison, à l’exception de mes trésors que j’avais bien cachés.

C’est avec une peine immense que j’ai quitté la maison dans laquelle j’avais grandi, laissant derrière moi une partie de mon enfance, de mes souvenirs, de ma mère et de moi-même. Dans cette demeure dont exhalait un parfum familier, il régnait une atmosphère unique. Nous y avions laissé nos marques,

certaines sur les murs, d’autres dans le jardin. Tout cela resterait ici, tandis que nous partions vers une île inconnue où papa était né et avait sa famille…

Dans le taxi nous conduisant à l’aéroport, je regardais tristement les paysages défiler et voyais mon passé s’éloigner quand, soudain, j’ai réalisé que je n’entendais plus le son de la voix qui m’avait si souvent bercée. En plein désarroi, je n’ai pu réprimer un sanglot. La Réunion allait-elle être meilleure pour moi ? J’avais du mal à le croire.

1. La Rencontre

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Août 2008

Quelle poisse ! C’était ma rentrée au lycée Roland Garros et j’étais déjà en retard. Papa était trop soûl pour se réveiller et nous conduire ce matin, nous avons dû marcher. Fort heureusement, ce n’était pas si loin – juste à 2 kilomètres de la maison- et l’école d’Ophélie se situait en face du lycée. «Enfin arrivée! Voilà le tableau. J’ai cours de français avec mon prof’ principal, un certain Mr Duchemann, salle 201. Pourvu que je m’y retrouve, je n’ai pas eu le temps de visiter!»

Je m’attendais à trouver un vieil homme aux cheveux grisonnants, portant de grosses lunettes noires et barbant à souhait. En ouvrant la porte, quelle n’a pas été ma surprise face à cette salle remplie d’élèves écoutant attentivement un homme d’à peine une trentaine d’années. Un homme élégant qui n’a pas souri en me voyant arriver avec une demi-heure de retard.

— Bonjour, je suis Camille Mussard, désolée pour le retard. Je suis… Je m’apprêtais à dire nouvelle, mais il m’a coupée net :

— Asseyez-vous ici en face de moi. Je ne tolère pas les retards. C’est le premier jour et vous faîtes plutôt mauvaise impression, Mlle Mussard.

— Désolée, je… — Dépêchez-vous donc de vous installer!

Oups ! Ce n’était pas gagné, il me saquerait sûrement. Je me suis vite assise à la place désignée et je me suis faite toute petite, déballant mes affaires dans le plus grand des silences. C’est alors que Mr Duchemann m’a demandé de me lever pour me présenter à la classe. La loose! C’est en balbutiant que j’ai de nouveau déclamé mon identité :

— Je suis Camille Mussard, j’ai 17 ans. Je suis… nouvelle à La Réunion. Avant, je vivais dans le sud de la France. C’est tout.

Mais, Mr Duchemann n’en avait pas fini avec moi et il m’a questionnée sur les livres que j’avais étudiés l’année précédente et ce que j’avais fait pendant les vacances. Un interrogatoire qui me mettait mal à l’aise, je me suis mise à bredouiller en sentant tous ces regards sur moi et en entendant ces rires derrière mon dos. J’ai tenté de refouler mes larmes. Ma mère me manquait plus que jamais, de même que mes amies et ma petite Ophélie. J’espérais que celle-ci avait plus de chance que moi au même instant.

Le professeur m’a ensuite tendu une feuille de papier sur laquelle je devais compléter des informations sur mes parents, sur mes passions, sur ma vie quoi ! C’est avec les nerfs que j’ai rempli ce formulaire :

NOM : MUSSARD

Prénom : Camille

Age : 17 ans

Profession des parents : père infirmier, mère sans profession

Je ne voulais pas lui communiquer que ma mère était morte, je ne sais pas pourquoi. Peut-être que je craignais qu’il le dise à la classe et que l’on me prenne en pitié. J’ai donc écrit qu’elle était sans profession, ce qui n’était pas faux !

Livres préférés : Nicolas Sparks, « The Notebook » Marc Lévy, « Où estu ? »

Hobbies : Musique

Mes réponses n’ont pas eu l’air de convenir au professeur, puisqu’en regardant ma fiche, il a fait la grimace et a écrit quelque chose, probablement « élève en retard pour le premier jour de classe ».

Lorsque la sonnerie a retenti, tous les élèves sont sortis, tous sauf moi qui n’avais pas envie de me mêler à la foule. Une jeune femme élégante est entrée pour parler à Mr Duchemann. L’appelant Mickaël, elle s’est appuyée au bureau, a fait tout un tas de gestes avec ses mains et a souvent secoué ses longs cheveux laissés libres.

Profitant de la récré, j’ai jeté un coup d’œil autour de moi: les murs m’ont paru bien tristes avec des graffitis ça et là et de la fenêtre on ne pouvait pas voir la mer mais seulement un ciel nuageux- à quoi bon vivre sur une île si on ne peut pas voir la mer? De mon sac à dos, j’ai sorti mon lecteur MP3 pour écouter un peu de rock. Avec les écouteurs dans les oreilles, je me suis laissé emporter par le son de la guitare électrique, très loin dans mes pensées. Je n’ai donc pas entendu les élèves qui revenaient. Lorsque Mr Duchemann s’est approché de moi la main tendue, j’ai réalisé trop tard qu’il voulait récupérer mon lecteur MP3, et c’est en grinçant les dents que je le lui ai remis.

Le cours étant fini, j’ai enchaîné avec l’anglais, puis l’espagnol. Aussi lorsqu’à onze heures trente la sonnerie a retenti, les élèves se sont rués vers le réfectoire, j’ai suivi le flot. Dans la salle envahie par le brouhaha continu des rires et des cris des autres lycéens, j’ai repéré au fond, une vieille table en formica – «la mienne» ai-je pensé – un endroit retiré et mal éclairé, personne ne viendrait m’y embêter. Comme j’avais récupéré mon baladeur, j’ai déjeuné au son d’Oasis.

Sortant un peu de ma bulle, j’ai remarqué que plusieurs personnes me fixaient du regard, y compris Mr Duchemann qui était attablé avec d’autres professeurs. Mais que me voulait-il celui-là ? Et les autres, c’était quoi leur problème? Il faut dire que depuis la mort de maman, je ne portais essentiellement que des vêtements noirs qui contrastaient sensiblement avec le flamboyant de mes longs cheveux roux. Aux pieds, j’avais presque toujours mes Converse préférées : les vertes, celles que maman m’avait offertes au dernier Noël passé avec elle. C’est sûr que mon look ne passait pas inaperçu. Il reflétait juste l’état de mon âme: sombre et révoltée. Ignorant cette attention persistante, j’ai ouvert un livre et plongé mon nez dans un poème de Verlaine :

CHANSON D’AUTOMNE

Les sanglots longs

Des violons

De l’automne

Blessent mon cœur

D’une langueur

Monotone.

Tout suffocant

Et Blême,

quand Sonne l’heure,

Je me souviens

Des jours anciens

Et je pleure ;

Et je m’en vais

Au vent mauvais

Qui m’emporte

Deçà, delà,

Pareil à la Feuille morte.

C’était exactement mon état intérieur à ce moment précis! J’ai vite essuyé la petite larme qui coulait sur ma joue. Repensant à maman qui m’accompagnait à chaque rentrée et déposait sur mon front un baiser pour me souhaiter bon courage, j’ai tenté de réprimer ma tristesse. Manquant d’air dans ma solitude et sous le regard inquisiteur de tous ces inconnus, brusquement je suis sortie.

Plus tard, c’est pressée que je suis rentrée à l’appartement. Ça avait été une rude journée où j’avais affronté l’incompréhension et le rejet des autres, la rencontre avec un nouvel environnement et une culture diamétralement opposée à la mienne. Dans la chambre, je me suis littéralement jetée sur mon lit, pleurant de tout mon soûl, étouffant mes cris dans l’oreiller et tapant des poings contre le matelas. C’est dur, je n’y arriverais pas ! C’est si dur sans toi, maman!

Les jours qui ont suivi ont plus ou moins été les mêmes, je restais dans la classe durant les pauses. Personne parmi les lycéens ne faisait l’effort de m’adresser la parole et je m’asseyais toujours seule à la vieille table dont personne ne voulait au réfectoire, écoutant ma musique. Rien d’original, ni d’extraordinaire.

Jeudi 21, Français: rédiger un poème. Thème libre.

La veille, papa est rentré ivre et s’est emporté quand il s’est aperçu que je n’avais préparé à manger que pour Ophélie et moi. J’ai tenté de lui expliquer que je n’étais pas sûre qu’il rentrerait dîner, il s’est énervé et a fracassé la vaisselle sur le sol. Il a attrapé mon bras, le pressant de toutes ses forces et il a hurlé:

— J’ai toujours mangé ici, non ? Range-moi tout ça maintenant! C’est entendu ?

— Oui.

L’empreinte de ses doigts est restée sur mon poignet meurtri. J’ai soufflé à Ophélie de se mettre au lit de suite. Ses yeux étaient remplis d’inquiétude et de larmes. Je me suis dépêchée de tout nettoyer. Quand j’ai rejoint ma petite sœur, elle pleurait. Je l’ai prise dans mes bras et lui ai promis qu’un jour, on s’en irait toutes les deux dans un endroit calme et paisible. Une fois qu’elle s’est endormie, je me suis mise à bosser ma poésie jusqu’à tard dans la nuit.

Le lendemain, habillée en quatrième vitesse pour préparer Ophélie, j’ai avalé une tartine avec de la confiture et un café bien serré.

— Ophé, j’ai mis ton goûter dans la poche de devant. Tu ne l’oublieras pas cette fois-ci !

— Oui ma sœur chérie, mais je ne veux pas aller à l’école, c’est nul ! J’aime pas cet endroit.

— Tu dois y aller pourtant. Tu es grande et si tu veux qu’un jour, on s’en aille toutes les deux, il faut que tu apprennes bien à l’école. Courage ! Tu te feras vite des copines.

— Mais je ne veux pas y aller si tôt.

— J’ai une idée: tu vas venir à mon école. Je t’emmènerai avec moi au CDI [Centre de Documentation et d’Information]. La dame qui y travaille est très gentille. Je lui demanderai si tu peux attendre là jusqu’à 8h, après tu devras aller seule à l’école. Il n’y a qu’une rue à traverser. Tu te souviens comment on traverse la rue, n’est-ce pas? Je te l’ai appris.

— Ok… Je veux bien faire comme ça.

Ophélie a suivi mes instructions et est restée sage à côté de la documentaliste. Cette dame, d’environ la cinquantaine, avait le visage doux et le regard tendre. Elle était aussi l’une des rares personnes à m’avoir souri et montré un peu de bonté en me dirigeant dans le bahut, au début lorsque j’étais perdue. Elle avait su gagner ma confiance.

— Moi, c’est Elisabeth, apprit-elle à Ophélie. Je te dirai quand il sera l’heure.

— C’est d’accord. Merci.

— Ophé, tu dois être sage avec la dame ou bien la prochaine fois, je ne pourrais plus t’y emmener.

— Oui je serai gentille, c’est promis.

J’étais plus rassurée de la laisser là à quelques mètres de moi, que de la laisser devant l’école même s’il y avait du monde aux alentours. Elle n’a eu qu’une demi-heure à patienter.

Une fois le cours commencé, Mr Duchemann a demandé à chacun de nous de lire notre poème devant la classe. Terrorisée à l’idée de prendre la parole en public, mes mains tremblaient et ma gorge était serrée. C’était à mon tour.

— Mademoiselle, c’est à vous.

Je me suis levée et me suis retournée face à la classe. Tous les yeux étaient braqués sur moi. Alors, j’ai paniqué. J’ai eu du mal à tenir ma feuille, aucun mot ne voulait sortir de ma bouche, j’étais bloquée.

— Mlle Mussard, on vous attend. N’ayez pas peur, c’est juste une lecture.

— Chagrin d’été…

CHAGRIN D’ÉTÉ

Dans un murmure j’ai couché

Des vers sur le papier.

A l’usure j’ai composé

Ce doux poème pour nous

Afin de n’jamais oublier

Ce passé déjà flou.

Tant de larmes j’ai versées

Dans le creux de ton cou.

Je voudrais encore sentir

Ton parfum épicé

M’accrocher au souvenir

Du toucher de tes mains

Du son de ta voix sereine

Qui disait que demain

Serait meilleur que la peine

Qu’aujourd’hui je ressens.

                          *

Tout comme toi j’aimerais

Partir à jamais

Pour que cesse l’effroi

De ma vie sans toi.

Ce chagrin qui me tue

A raison de moi.

Mon âme mise à nu

J’ai perdu la foi.

Je lutte contre la haine

Mais ne suis qu’humaine.

Pourquoi garder l’espoir

D’un jour te revoir

Continuer d’avancer

Malgré les regrets?

J’me rends à l’évidence:

Vivre en ton absence.

— C’est un beau poème. C’est dommage que vous l’ayez lu de cette façon. Recommencez.

— Chagrin d’été…

— Plus fort! Nous voulons vous entendre.

J’ai eu le sentiment que ce cauchemar ne finirait plus. Je l’ai lu trois fois, la première en bredouillant, la deuxième trop doucement et la troisième trop vite, pressée que j’étais de me rasseoir. Mr Duchemann a pris ma feuille et a lu mon poème avec le ton que j’avais imaginé dans ma tête. Il a prononcé les mots avec justesse, sa voix se mêlant à mes émotions. Je n’avais pas su ni même voulu le faire et ainsi me dévoiler. Malgré tout, j’ai eu 15/20 et j’en étais satisfaite.

Chagrin d’été… Personne n’a cherché à savoir de qui je parlais et au fond de moi, j’en étais soulagée. A la fin de la journée, j’emportais mon secret, la tête pleine du souvenir de maman, la plaie de mon coeur ravivée.

2. Pensées

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Quelques jours après la rentrée…

Bonjour, s’est exclamé Mr Duchemann visiblement de bonne humeur. Comme évoqué à notre premier cours mardi dernier, voici les trois œuvres au programme de cette année : le roman épistolaire de Pierre Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses; la tragédie de William Shakespeare, Roméo et Juliette; enfin, l’œuvre philosophique de Blaise Pascal, Pensées. Pour notre étude, nous nous appuierons sur les adaptations cinématographiques des deux premières, mais commençons par Pensées. J’espère que vous avez apporté votre livre. Si vous n’avez pas pu l’acheter, il est disponible au CDI. Je n’accepterai aucune excuse.

— Je l’ai oublié, ai-je bredouillée en levant timidement la main.

— Je vous en avais pourtant informée, Mlle Mussard! Vous avez reçu la liste et le calendrier la semaine dernière, s’est-il agacé.

— Je suis désolée, je n’y ai pas fait attention.

— Vous voulez donc me dire que j’ai passé des heures à préparer ces fiches pour rien? Bon, asseyez- vous à côté de Melle Dubard et faites-nous la lecture de la page 65 à partir de « Qu’est-ce que l’homme dans l’infini ? »

— C’est ici, m’a gentiment montré Julie en rapprochant son livre de moi.

— Merci, ai-je répondu timidement. C’était la première fois que quelqu’un de ma classe me parlait.

J’ai lu avec hésitations, puis celui que j’avais baptisé «le bourreau» a fait remarquer:

— C’est «ciron», pas «citron».

Ce qui, bien sûr, a déclenché l’hilarité générale.

— On n’ se moque pas, s’il vous plaît! Mlle Mussard, dans cet extrait, que comprenez-vous ?

— Euh, je ne sais pas.

Ne rien dire plutôt que de paraître stupide, voilà ma technique ! Je ne connaissais pas la classe et le regard des autres me dérangeait. Papa m’avait toujours dit: « Camille, vaut mieux se taire que dire des bêtises ! »

— N’avez-vous rien compris à ce que vous avez lu? Allez, faites un effort, quel est votre passage favori ?

Depuis la rentrée, ce prof’ n’avait pas arrêté de me tomber dessus, comme si j’avais été la seule élève de la classe. Il va me lâcher, oui ?! Ça promet !

— Euh, celui-ci me plaît bien: « Car enfin, qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre un rien et un tout. »

— En quoi ce passage vous interpelle ?

— J’sais pas trop, ai-je marmonné.

— Essayez, Mussard, dit-il en soupirant.

Pourquoi ne me fiche-t-il pas la paix ?!

— Pour moi, on reconnaît la grandeur de l’homme à quoi il se mesure.

— Bien. Développez.

— Eh bien, la vie nous apprend sur nous-mêmes, elle nous humilie d’une certaine façon.

— C’est-à-dire ?

— Je me rends compte que si l’homme est vulnérable, c’est aussi l’être le plus puissant sur cette terre, car il est le seul doté d’une pensée, d’un esprit, contrairement aux plantes et aux animaux.

J’avais balancé tout ce que je pensais pour qu’il cesse de me questionner, en vain.

— De quelle façon la nature nous humilie-t-elle ? a-t-il insisté.

— Elle nous amène à prendre conscience que nous sommes fragiles. L’homme n’est pas maître de son destin, il ne peut pas contrôler les saisons par exemple, encore moins les catastrophes naturelles.

Il a le monde à sa portée et en même temps, il n’y est qu’un pèlerin. Je veux dire que la nature nous ramène face à cette réalité: tout est éphémère.

J’espère qu’il va me laisser tranquille maintenant. Pourquoi me pousser comme ça dans mes retranchements?

— Très bien Camille. Gabrielle Roy a dit: « C’est une chose si petite, si éphémère, si docile, la vie d’un homme » et c’est bien vrai. Vous voyez que ce n’était pas si difficile. Vous êtes capable de bien plus encore, Mlle Mussard. Mon but dans ce cours n’est pas seulement de vous enseigner la littérature. Cette année, je veux vous apprendre à penser par vous-mêmes, à aller au fond des choses et à ne pas avoir peur de vous exprimer. Je vais aussi vous apprendre à lire en y mettant le ton, avec le rythme qu’il faut. Je vais vous prendre la tête, mais vous sortirez de là plus fort. Comme je le disais le premier jour, je serai dur avec vous, je serai votre pire cauchemar, mais je saurai aussi récompenser vos efforts. Tout travail mérite salaire, n’est-ce pas ? Rappelez-vous que je ne suis pas là pour vous casser ni vous humilier, mais pour vous aider à vous construire et devenir des jeunes hommes et des jeunes femmes de valeur. Ceci étant dit, continuons.

— Eh ben, m’a murmuré Julie, la rumeur était vraie!

— Ah ouais, qu’est-ce qu’on dit?

— Tout le monde dit qu’il est sévère. Y en a même qui le détestent, mais la plupart disent qu’il est génial et comme tout le temps, y a un groupe de filles qui craquent pour lui.

— Sévère je confirme, il n’arrête pas de me tomber dessus depuis que je suis arrivée. — Mr Durand, à vous de lire la suite.

Ouf ! Le supplice est fini.

Midi. Au réfectoire.

Menu du jour : Salade de carottes / Pâtes au saumon / Yaourt à la vanille

Je vais faire l’impasse sur les carottes. Oh non! Quelqu’un est assis à la table du fond. Qui est l’idiot qui a envahi mon espace ? Tant pis j’y vais quand même.

— Cette table est prise, a grogné le mec à la peau bronzée.

— J’masseois là d’habitude, ai-je répondu, sous le choc.

— Ben, plus maintenant!

Ignorant ma présence, l’envahisseur a replongé son nez dans son cahier de dessin pour griffonner au crayon de papier. C’est donc à une table près de celle des profs que je me suis assise, celle des intellos !

— Hé! Mussard, tu as trouvé ton camp, a crié Christophe, provoquant les rires de ses copains de tablée.

Tout dans ce lycée, fonctionnait par clichés : la table des intellos, le club des scientifiques, le coin des artistes, le clan des branchés… It seems that I do not fit in with the crowd [Il semble que je ne me fonde pas dans la masse]. J’évoluais effectivement en dehors du moule, comme la marginale de service.

J’prends mon mal en patience

Use habilement du silence

Pour faire taire le mépris

Des autres personnes ici.

Je porte sans regret

Un masque mal ajusté

Afin que personne ne voit

Le mal qui croît en moi.

                      *

Sourire, c’est prévenir

Les questions, la pitié.

A distance me tenir

De toute fausse amitié.

M’ouvrir, c’est souffrir

Me fermer, c’est m’protéger.

Et ainsi, eviter

De panser seule mes plaies.

Jamais trop tard… à découvrir J-5

JAMAIS TROP TARD… À DÉCOUVRIR DANS J-5

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Enfin voilà la couverture du nouveau roman qui sera publié gratuitement sous forme de feuilletons (à raison de 3 chapitres par semaine) à partir de samedi 14 février sur la page FB Jamais trop tard et sur mon blog.

Merci à Gaëlle Berthilde pour tout, de croire en moi, de vivre ce rêve à mes côtés. Merci à Djeems Gufflet, mon époux de me soutenir, pour les photos et à ma soeur chérie Adeline Bégue d’avoir bien voulu être le modèle dans le rôle de Camille.

JOUR J-5…

Youpi!!!

See u soon